Juin 2012, je suis avec mon ami Fabrice au bord d'un lac de l'Est de la France. Le réveil est difficile, nous venons de passer une nuit très mouvementée avec de jolis poissons à la clé mais le froid et la pluie ternissent le tableau. Il fait 14° et pour un mois de juin on ne risque pas d'attraper un coup de soleil. Nous sommes en train de discuter des futures destinations de nos pêches automnales, et Fabrice me dit, ça serait sympa l'Espagne au mois de novembre, on aura toujours plus chaud que chez nous !!! Cela faisait longtemps que je rêvais d'aller combattre les belles communes Espagnole, et voir de plus prêt ces silures gigantesques que je voyais dans les magazines, alors c'est sans hésiter une seconde que je lui dis, va pour l'Espagne !
Nous prenons contact avec Marc HENNES un ami de Fabrice, il est guide de pêche depuis 4 ans sur Méquinenza et Caspe et cela fait un an qu'il a crée Ebro Fishing Tours. Il nous confirme que la pêche est tout à fait possible pour la mi-novembre, avec des températures généralement clémentes, mais avec une pression de pêche qui est quasi nulle à cette époque.
Dimanche 4 novembre, je viens de réaliser une pêche incroyable sur un lac ou je faisais 2 à 3 nuits par semaine depuis un mois, et qui ne m'avait offert jusque là qu'une décroche. Je raconte ma nuit de folie à Fabrice, qui n'en revient pas de mon triplé de 20+ dont une miroir de 25.5kg. Il me dit maintenant que le lac commence à produire il fait un temps épouvantable à Méquinenza, Marc vient de lui apprendre qu'il pleut depuis plusieurs jours et que la température de l'eau est en chute libre. Quelle poisse !
Samedi 10 novembre, il est 13h30 quand nous fermons les portes de la camionnette qui est pleine à craquer pour effectuer les 1300 km qui nous séparent de notre destination. Le lendemain à 13h nous voyons enfin le mythique pont de Méquinenza. L'eau est assez trouble et les gros herbiers qui dérivent témoignes des pluies de la semaine passée. Nous allons voir Caspe et là c'est un lac au niveau relativement bas qui se présente à nous, mais qui connaît un marnage assez important, avec en une journée près de 2 mètres en plus. La pression de pêche est plus forte sur Caspe, et nous décidons de rester à Méquinenza pour les 2 premiers jours.
Lundi 12 novembre, nous sommes enfin en place. c'est avec une vue sur le château et un magnifique soleil que je suis en train de sonder à l'aide de mon HDS 10 cette eau si mystérieuse. Je découvre un lit de rivière assez propre avec 13 m de fond déjà à 20 m du bord. Le fond est uniforme jusqu'à 180 m, là se trouve une plantation d'arbres immergés avec des échos plein l'écran. Les spots sont nombreux mais très encombrés, il va falloir la jouer « fein sérré ». Fabrice n'étant pas amateur de distance, il préfère pêcher la bordure d'un petit renfoncement, avec deux cassures à 6 et 9 m de profondeur. Moi je tente le haut fond avec les arbres à 180 m dans 9 m d'eau. La première journée sera sans aucune activité, mais nous sommes confiants pour le lendemain car il faut bien laisser agir les 20 kg de bouillettes et de pellets que nous venons d'éparpiller.
Mardi, je viens de combattre un silure de 1.75 m, mon premier poisson Espagnol ! je suis venu pour les carpes mais suis ravi de la beauté et la force de cet adversaire lors du combat. Fabrice fera aussi un silure, mais toujours pas la moindre écaille en vue. Les herbiers dérivent toujours et c'est toutes les deux heures qu'il faut replacer les cannes, pour le lendemain nous décidons de changer de poste.

Mercredi, nous décidons de pêcher près de l'embouchure du Matarrania, l'endroit est très encaissé et les falaises qui bordent le lac sont magnifiques. Un rapide sondage nous montre une zone très encombrée à 80 m du bord dans 6 à 9 m de fond. De nombreux arbres et même un vieux bateau offrent des abris de premier choix aux poissons du secteur. Après 1 h de pêche j'enregistre mon premier départ, en quelques secondes elle est déjà dans les arbres, et m.... ! Le scénario se répètera encore 4 fois en 3 h, toujours la même chose, un départ surpuissant avec un tout droit dans les arbres suivi d'une décroche ou d'une casse. Ah la poisse, il est temps de réagir. Je pars à la recherche d'une zone moins encombrée, et fini par trouver une zone assez propre avec juste un arbre de 4m de haut dans 8.50 m de fond. Je repose mes cannes avec un amorçage conséquent pour essayer de les faire sortir d'une petite dizaine de mètres de leur abri, pour avoir enfin une chance de les stopper.


Jeudi midi, toujours rien. Décidément elles ont bien du mal à quitter leur zone refuge. Il faudra attendre le début de la soirée pour que je tienne enfin ma première carpe Espagnole dans les bras, elle sera le début d'une belle série avec un départ toutes les deux heures. L'amorçage commence enfin à faire sortir les carpes et les mettre en appétit. Je fais mes premiers départs à la bouillette avec les pop up Yellow Pineapple fever, mais ça sera quand même presque 80% des touches sur des pellets Gulp ! Carp Halibut de 20 mm. A force de profiter des tonnes de pellets déversés pour les silures elle y ont pris goût, et il est bien difficile de les attirer uniquement avec des bouillettes.

Vendredi, nous décidons malgré les départs réguliers de changer de poste, il nous reste que jusqu'à lundi matin et nous voulons retourner sur Méquinenza pour le week-end. Nous avons quelques courses à faire et souhaitons voir si il y a toujours autant d'herbiers qui dérivent. Le passage sur le pont nous donne le sourire, aucun débris à la surface du lac et juste deux Allemands qui pêchent sur plusieurs kilomètres de berge. Nous choisissons un poste proche du premier que nous avions en début de semaine, car nous avons le sentiment de ne pas avoir pu exploiter le secteur correctement à cause des nombreux herbiers qui dérivaient. Je repose mes cannes le long de la rangée d'arbres à environ 180 m et Fabrice tente cette fois-ci le lit de la rivière à 80 m. Nous poserons également des cannes pour le silure avec 4 pellets sur un cheveu avec un Hayabusa 5/0. La première soirée nous apportera un double départ avec un silure de 1.66 m pour moi et 1.45 m pour Fabrice, un véritable moment de bonheur et de partage.

Samedi, il pleut, et à part un petit silure nous n'avons aucune activité. Nous commençons à regretter d'être parti du Matarrania et ne voyons pas comment réussir à débloquer la situation. C'est finalement un amorçage très lourd avec 60kg de pellets et 20kg de bouillettes qui finira par nous apporter des départs réguliers de silures puis de carpes durant la journée de dimanche.
Lundi, nous prenons déjà notre dernier petit déjeuner. C'est un soleil magnifique qui fait grimper le thermomètre au-delà des 20°, rendant le rangement des affaires encore plus dur, surtout que les nouvelles de la France ne sont pas bonnes, déjà plusieurs jours de brouillard et des gelées. Le retour à la réalité va être dur, et nous avons bien du mal à vouloir quitter ce paradis. C'est à ce moment que se produit un départ, au ferrage je comprend que c'est du lourd, même du très lourd, mais après 15 sec de combat je décroche, quelle m.... !!! Il reste encore trois cannes à l'eau et cela fait plusieurs fois que nous avons des tapes dans la tresse, et il ne faudra attendre que 15 min pour obtenir un deuxième départ. Cette fois c'est une carpe qui me fait un tout droit vers les arbres, mes 3.75lbs suffisent à peine pour la stopper et la faire changer de direction. C'est une magnifique torpille taillée pour le combat avec une épine dorsale aussi pointue qu'une aiguille qui rejoindra mon épuisette. A la fin de la séance photo la canne à silure de Fabrice démarre, le combat est bref, une commune d'une dizaine de kilos vient d'aspirer quatre pellets de 20 mm et un hameçon de 5/0. C'est la troisième carpe que l'on fait sur un tel montage en deux jours, ce sont de vrais aspirateurs les carpes ici !!!

Il ne reste plus que ma canne à silure à l'eau et je compte bien la laisser pêcher jusqu'à la dernière seconde. C'est au moment de charger la camionnette avec les premières affaires que ma canne se plie une première fois, puis une deuxième. Je ferre et prend contact en pensant que c'est également une carpe, mais là, les mouvements sont trop lents et puissants pour en être une. Je tenais au bout de ma ligne une vrai locomotive, j'exerçais une pression constante depuis prêt de 15 min, et toujours rien, il collait le fond sans donner de signes de fatigue. C'est après 40 min qu'il commença à lâcher des bulles, et c'est à ce moment là que Marc me dit « c'est un gros mon ami, un très gros ». J'ai les bras qui commencent à trembler tellement la pression est forte et que le combat est long, il monte pour la première fois après plus de 45 min, et là c'est un « wouhaw p..... le bloc, quel monstre !!! » qui s'échappe de notre bouche. Il replongera une dernière fois avant de se rendre, me faisant au passage une dernière frayeur en se bloquant dans les roches. C'est quand il sera couché devant moi que je réalise que je viens de prendre un de ces monstre de l'Ebro, un silure de 2.30 m qui ma offert un combat de folie.


Et voilà, il ne reste plus de canne à l'eau, nous finissons notre séjour sous un soleil radieux. C'est avec un pincement au c½ur que je salue Marc, en le remerciant pour son aide et son savoir-faire ainsi que Sabine, sa compagne qui nous aura préparée des repas dignes d'un 3 étoiles Michelin, tous deux nous aurons fait passer des moments inoubliables à mon ami Fabrice et moi-même.
A une prochaine session,
Jean-François.
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